• Visions d’un monde parallèle

    En septembre 1768, un jeune homme de seize ans se rendait à l’Université de Leipzig avec deux passagers de Francfort. La plus grande partie du voyage s’était déroulée sous la pluie et la voiture avait parfois du mal à monter les côtes. Une fois, alors que les voyageurs avaient quitté leur siège pour marcher derrière les chevaux, le jeune homme remarqua un objet étrange et lumineux au niveau du sol.
     
    « Soudain, dans un ravin à droite de la route, je vis une sorte d’amphithéâtre merveilleusement illuminé. Dans un espace en forme de tuyau brillait un nombre incalculable de petites lumières posées comme des marches les unes sur les autres; et elles brillaient si fort que l’œil en était ébloui. Mais ce qui troublait le plus dans cette vision, c’était que les lumières n’étaient pas fixes, elles sautaient de-ci, de-là, allaient de haut en bas et vice versa, dans toutes les directions. Le plus grand nombre d’entre elles, pourtant, restait stable, et rayonnait. C’est avec la plus grande répugnance que je consentis, lorsqu’on m’appela, à m’écarter de ce spectacle que j’aurais bien désiré examiner de plus près. Le postillon, quand je l’interrogeai, déclara qu’il n’avait jamais eu connaissance d’un tel phénomène, mais qu’il y avait dans le voisinage une ancienne carrière de pierre dont l’excavation était remplie d’eau. Reste à savoir maintenant si cela était un pandémonium de farfadets, ou une assemblée de créatures lumineuses, je ne saurais décider.»
     
    Le jeune homme en question était Goethe. On peut trouver cette description dans le sixième livre de son autobiographie. Le poète et homme de science allemand aurait-il eu l’occasion d’en savoir davantage sur ces « lumineuses créatures », s’il avait vécu au XXe siècle ? Si Paracelse revenait, trouverait-il de nouveaux matériaux pour ses théories sur la nature de ses races étranges et fugitives d’êtres venus du ciel ? Nous pouvons avancer avec certitude que leur attention se serait immédiatement portée sur les archives des atterrissages d’O.V.N.I.
     
    « Visa pour la Magonie , chroniques des apparitions extra-terrestres ». Jacques Vallée, 1972.

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  • Le marathonien qui mit 54 ans à finir sa course

    Il s’appelait Shizo Kanakuri, et normalement, on aurait dû le trouver. Le bonhomme n’était certes ni très grand (1,70 m) ni très gros (64 kg), mais tout de même, un Japonais à Stockholm, cela se remarque ! Surtout en 1912…

    Pour arriver là, Kanakuri avait effectué un voyage long de dix-huit jours, par la mer d’abord, puis par le train transsibérien, avant d’arriver exténué dans la capitale suédoise. Il lui avait fallu cinq jours de récupération pour être capable de s’aligner au départ du marathon olympique, but de son périple. Visiblement, cinq jours ne suffisaient pas.

    Le marathon des Jeux de Stockholm fut, il est vrai, l’un des pires de l’Histoire. Disputé sous une chaleur accablante, il mit sur le flanc la moitié de ses participants. Trente-deux abandons au total, et même un drame. Le Portugais Francisco Lazaro s’effondra sur la fin du parcours, victime d’une insolation et d’un problème cardiaque. Immédiatement conduit à l’hôpital, il y succomba le lendemain, devenant le premier mort des Jeux olympiques. Il avait 21 ans. Le même âge, à peu de choses près, que Kanakuri, né le 20 août 1891 au Japon.

    Lui n’était pas décédé. Du moins l’espérait-on. Car, à l’issue de la course, nulle trace de lui. Il avait pris le départ, c’était certain, tout comme il était établi qu’il n’avait pas terminé. Mais il ne figurait pas non plus parmi les coureurs ayant abandonné, que les organisateurs avaient ramassés sur le parcours.

    Les efforts de la police, mise sur l’affaire, furent tout aussi vains. Et Kanakuri devint rapidement en Suède « le Japonais qui a disparu », une sorte de légende urbaine à la sauce suédoise. Les rumeurs se multiplièrent. Certains l’auraient vu tituber dans Stockholm, cherchant désespérément l’entrée du stade olympique. D’autres, boire un verre en compagnie de deux troublantes beautés locales… Aucune piste ne tenait la route. Et puis, peu à peu, on l’oublia.

    Personne en Suède ne remarqua que Shizo Kanakuri participa aux marathons olympiques d’Anvers en 1920 (il s’y classa 16e) et de Paris en 1924. Ou plutôt, personne ne fit le rapprochement avec le « disparu » de Stockholm, huit et douze ans plus tôt… En 1952, à l’occasion du 50e anniversaire des Jeux, un journal suédois décida de repartir à sa recherche. Le reporter retrouva Kanakuri dans la ville de Tamana qui l’avait vu naître, et dans laquelle il s’éteindrait en 1984, à l’âge de 93 ans. Il y était professeur de géographie et accepta pour la première fois de raconter son histoire.

    Au trentième kilomètre environ de ce marathon dantesque, Kanakuri s’était écroulé dans le jardin d’une maison suédoise. Ses occupants, compatissants, lui avaient proposé un verre d’eau et même un lit pour se reposer. Le Japonais s’y s’était si bien senti qu’il s’était endormi jusqu’au lendemain matin. Ses hôtes lui avaient ensuite donné des vêtements et l’avaient mis dans un train à destination de Stockholm…

    De honte de n’avoir pas terminé sa course, de peur d’avoir à s’expliquer, il s’était immédiatement embarqué sur un navire en partance pour le Japon, dans la plus grande discrétion…En 1967, Shizo Kanakuri revint à Stockholm à l’occasion de l’inauguration d’un grand magasin. Invité, à l’âge de 76 ans, il put enfin se racheter. Conduit au stade olympique, devant un public aux anges, « le Japonais qui a disparu » trottina toute une ligne droite et franchit enfin la ligne d’arrivée. Sa performance sur le marathon s’établit alors à 54 ans, 8 mois, 6 jours, 32 minutes, 20 secondes et 3 dixièmes ! La pire de l’histoire olympique. Et sans aucun doute pour toujours.

    Extrait de « PETITES HISTOIRES DU 100 METRES ET AUTRES DISCIPLINES. »  Etienne Bonamy et Gérard Schaller, Hugo&Cie. Photo : Eurosport.

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  • Louis Le Prince, celui qu’on devrait saluer comme le père du cinématographe, disparut dans un train, en France, en septembre 1890.

    Cette année-là, à l’Opéra de Paris, il avait fait une démonstration de son procédé, utilisant un dispositif attribué par la suite à Edison. Son avenir s’annonçait brillant lorsqu’il monta dans ce train. Mais il n’en descendit jamais.

    Sept ans plus tard, on le déclara officiellement mort.
    Jay Robert Nash,  » Among the Missing « , p.253.« Le Grand Livre du mystérieux », Sélection du Reader’s Digest.

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  •  

    Depuis décembre 1899 où il a été édifié sur l’île rocheuse de Eilean Mor, au large des côtes écossaises, le phare a semblé maudit. Dans l’année qui a suivi sa mise en service, trois gardiens ont péri, un quatrième a fait une chute mortelle et plusieurs sont devenus fous. Puis, le 15 décembre 1900, le phare s’est éteint…

    Aucune explication ne donnera la raison à la disparition de trois gardiens du phare d’Eilean Mor, sur les îles Flannan, au large de la côte ouest de l’Ecosse. Ces roches désolées sont situées sur l’avancée extrême des îles Britanniques. La terre la plus proche est l’île de Lewis, dans les Outer Hebrides à 20 milles à l’est et à l’ouest, c’est l’Atlantique. Ces îles sont petites : la plus grande, Eilean Mor, n’a que 150 mètres de long.

    Quatre marins retraités s’occupaient de ce phare, ils y travaillaient par équipe de trois. Ils passaient chacun 6 semaines sur l’île, suivies de 2 semaines de repos à tour de rôle. Tous les 15 jours, le navire ravitailleur ‘Hesperus’ apportait le courrier et les vivres, débarquait un des gardiens rentrant de congé et repartait avec un autre prenant son congé de 2 semaines. Le 6 décembre 1900, c’était au tour de Joseph Moore d’être relevé. Quand le patron de l’Hesperus lui demanda s’il était content de venir à terre pour 15 jours, il répondit oui, et ajouta, le regard tourné vers la petite île qui disparaissait au loin : C’est un peu solitaire parfois.

    Le 21 décembre, Joseph Moore embarqua à nouveau sur l’Hesperus mais cette fois pour retourner à Eilean Mor. Le temps, qui avait été très calme, changea et une tempête s’éleva quand le bateau eut quitté le port. Pendant 3 jours l’Hesperus croisa au large des Hébrides, et c’est seulement le 24 décembre qu’il put approcher des îles Flannan. Moore fut très alarmé de constater que la lampe de 140 000 bougies du phare était éteinte. Bien que très  impatient de débarquer et de voir ce qui n’allait pas, il lui fallut encore attendre 2 jours avant que l’Hesperus pût s’approcher en sécurité du quai est de l’île. Rien n’avait été préparé pour leur arrivée. Sur la jetée, ils ne virent ni caisses d’emballage vides, ni câbles pour l’amarrage. Leurs coups de sirène de brume répétés ne firent sortir personne du phare.

    Une embarcation fut mise à l’eau, et Joseph Moore débarqua. Le portail d’entrée et la porte principale du phare étaient fermés. Moore entra et appela. Pas de réponse. Tout était froid et vide et, sur une étagère, la pendule était arrêtée. Moore eut peur de trouver les gardiens morts dans la tour du phare, et revint à la jetée demander de l’aide. Deux hommes montèrent avec lui. Il n’y avait aucun signe de vie. Le phare était absolument vide, mais tout était rangé et en ordre. Les mèches des lampes avaient été nettoyées et ébarbées, et les lampes remplies de pétrole étaient prêtes à être allumées. La dernière inscription sur le registre était du 15 décembre. Il n’y avait qu’une seule chose inhabituelle : deux des trois cirés et paires de bottes des hommes manquaient.

    Les marins de l’Hesperus fouillèrent l’île. Ils ne trouvèrent aucune trace des absents, mais découvrirent certains indices qui firent croire tout d’abord que le mystère était éclairci. Le quai ouest avait été très endommagé par l’ouragan. Sur une plateforme de béton située à 20 mètres de hauteur, il y avait une grue sur laquelle pendaient des filins. Ces filins étaient d’habitude rangés dans un coffre placé dans un renfoncement à 30 mètres au-dessus du niveau de la mer. Une tempête avec des vagues de plus de 30 mètres, aurait-elle assailli l’île et emporté le coffre, faisant tomber les filins sur la grue ? Avait-elle aussi emporté les trois hommes ? C’était peu vraisemblable, car de telles vagues géantes sont extrêmement rares. En outre, des gardiens de phare expérimentés n’auraient pas été assez fous pour s’aventurer sur une jetée pendant une tempête, et s’ils l’avaient fait, les trois cirés, et non deux, auraient été absents.

    Très inquiet, Moore examinait le journal de bord, en compagnie du commandant de l’Hesperus. C’est Thomas Marshall qui avait tenu le journal, et de ses brèves phrases surgissait la vision d’une terreur sans nom qui avait envahi les hommes sur leur rocher isolé. Voici ce que lut Moore : 12 décembre. Coup de vent du nord quart nord-ouest. Mer démontée. Isolés par la tempête. 21 heures. Jamais vu un tel ouragan. Vagues très hautes, se brisant sur le phare. Tout est en ordre. Ducat irritable. Moore et le commandant se regardèrent. Le 12 décembre aucune tempête n’avait été signalée à Lewis, à 20 milles de là. La remarque sur Ducat était également anormale. La suite avait été écrite à minuit le même jour : La tempête fait toujours rage. Le vent ne mollit pas. Isolés, ne pouvons sortir. Un navire passe en actionnant sa sirène de brume. Je peux voir les lumières des cabines. Ducat tranquille. Mc Arthur pleure. De nouveau, Moore et le commandant se regardèrent. A quelle extrémité en était arrivé le marin aguerri Donald McArthur pour pleurer ? Ils reprirent leur lecture. 13 décembre. L’ouragan a continué toute la nuit. Le vent hale l’ouest quart nord-ouest. Ducat tranquille. McArthur prie. Hier McArthur pleurait, aujourd’hui il priait !!! Midi. Le jour est gris. Moi, Ducat et MacArthur avons prié.

    Lorsque Moore fut appelé à déposer devant la commission désignée pour enquêter sur cette disparition, il déclara n’avoir jamais vu un de ses camarades prier. Ce ne pouvait être dû à leur peur de l’ouragan, car ils avaient tous affronté des tempêtes au cours de leurs longues années de navigation. Sur le journal restait cette dernière phrase : 15 décembre. 13 heures. Tempête terminée. Mer calme. Nous sommes dans la main de dieu. Rien n’avait été inscrit le 14 décembre. Pourquoi ? On ne le saura sans doute jamais. De même, que s’est-il passé ensuite ???

    L’enquête dévoila que, dans la nuit du 15 décembre, le vapeur Archer avait manqué se mettre au sec sur les rochers d’Eilean Mor, parce que le phare était éteint. On peut penser qu’à ce moment les trois hommes avaient disparu. Une tempête bizarre, non ressentie ailleurs, aurait-elle déferlé sur l’île ? Ducat et McArthur seraient-ils allés au quai ouest et auraient-ils été enlevés par une lame ? Il paraît plus vraisemblable que les hommes soient sortis par temps calme, une fois l’ouragan passé, pour tout inspecter, d’autant que la dernière phrase de Marshall sur le journal annonce la fin de la tempête.

    Mais personne ne peut dire ce qui est arrivé ensuite. Selon une supposition largement admise, l’un des trois hommes devint fou, tua ses deux camarades et se suicida. Tous les marteaux, tous les couteaux et toutes les haches étaient demeurés à leur place. Mais l’attaquant s’était peut-être servi d’une pierre comme arme. Il aurait alors précipité à la mer les corps de ses compagnons, puis se serait lui-même jeté à l’eau. Un des hommes a-t-il été saisi d’une folie religieuse ? A-t-il eu des visions ? Le furieux ouragan mentionné dans le journal de bord n’aurait-il existé que dans son esprit ? Après tout, les dégâts du quai avaient pu être causés par la tempête qui avait retardé l’Hesperus, après ces évènements mystérieux.

    Quoi qu’il soit arrivé au cours de ces jours et de ces nuits terribles, les rochers d’Eilean Mor en ont gardé le secret.

     « Les disparus du phare. » Strange stories, amazing facts. Reader’s Digest 1979.


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  • M. Bergenbach venait de mander auprès de lui le précepteur de deux neveux orphelins, auxquels il servait de second père, et lui dit :

    — Maître Lippobeck, quelles sottises apprenez-vous à vos élèves ?

    Le précepteur répliqua naïvement :

    — Je ne puis leur enseigner que les choses que je sais.
    — Je veux parler des ridicules histoires de fantômes, de revenants, de diables que..

    Lippobeck rougit jusqu'aux oreilles, et poursuivit en roulant de gros yeux :

    — Dieu me garde de leur parler de choses semblables. Le plus sage est de n'y point penser... même lorsqu'on ne veut pas y croire... comme moi... Mais il m'est impossible d'empêcher que nos chers élèves n'entendent quelquefois ce que l'on en dit... Ne savez-vous pas, Mein herr, que le gardien de Risberg est, ce matin, arrivé ici, et que le pauvre homme refuse de rester plus longtemps à son poste.
    — Je l'ignorais. Et pourquoi cela ?
    — Hermann affirme que depuis quelques jours ce château est ensorcelé.

    Un violent coup de poing que le bourgmestre frappa sur le bras de son fauteuil interrompit et fit sauter le pauvre précepteur comme si tous les diables eussent été à ses trousses. M. Bergenbach s'était levé et réfléchissait tout en se promenant à grands pas. Il donna enfin l'ordre de lui envoyer ses neveux.

    — Vous savez, leur dit-il sans commentaires, que votre grand oncle m'a légué la mission et le droit de décider auquel de vous deux appartiendra le petit chàteau de Risberg. Comme vous méritez également ma tendresse, je sentais qu'il me serait bien difficile de prendre une décision. Pour trancher la difficulté, j'ai résolu de le donner à celui de vous qui en prendrait possession aujourd'hui même et y demeurerait pendant vingt-quatre heures.

    Les deux jeunes Allemands ne purent réprimer un mouvement d'effroi.

    — Je vais, poursuivit leur oncle, vous faire préparer un panier de provisions. Dans une heure vous pouvez être au château de Risberg. Disposez-vous à partir. Maître Lippobeck vous accompagnera.

    Ces dernières paroles produisirent sur Lippobeck l'effet d'une saignée. Il pâlit, et ses jambes flageolèrent de la plus pitoyable façon. Il fallait obéir cependant. Nos trois personnages partirent donc pour le château de Risberg, et y arrivèrent une heure ou deux avant la fin du jour.

    C'était une charmante habitation, un peu isolée, mais à l'aspect riant : Hermann n'avait-il pas dit que, pendant tout le jour, on ne voyait ni n'entendait, dans celle-là, rien d'extraordinaire. Le bruit n'y commençait que la nuit, un bruit mystérieux dont les auteurs disparaissaient et ne laissaient aucune trace. Bien qu'il n'eût pas été habité depuis la mort de son propriétaire, c'est-à-dire depuis une année environ, le château dans lequel Lippobeck et ses élèves venaient de pénétrer avait encore toutes ses chambres meublées. Le pauvre précepteur, auquel le moindre bruit faisait faire des soubresauts continuels et des grimaces de vieux sapajou, insista pour qu'on s'établît dans la même pièce.

    — Certainement, dit-il, nous serions bien sots d'avoir peur. Mais le plus sage est de ne pas oublier que l'union fait la force.

    Le château de Risberg

    Après avoir soupé avec assez peu d'appétit, Fritz et Stephen se jetèrent tout habillés sur un lit qui se trouvait dans la salle où nos personnages s'étaient installés, et Lippobeck se blottit dans un grand fauteuil. Le précepteur avait voulu qu'on laissât une lampe allumée. Une heure s'était écoulée et le sommeil, auquel les trois Allemands finissaient par céder, les empêchait déjà d'entendre un piétinement sourd et léger qui avait, dans les chambres voisines de la leur, commencé à troubler le silence de la nuit. Un grincement métallique réveilla tout à coup les deux jeunes gens et leur compagnon.

    Le rideau d'une grande fenêtre s'était mis, comme  si une main invisible l'eût agité, à courir sur sa tringle de fer.

    Stephen se jeta dans la ruelle du lit, Lippobeck disparut sous son fauteuil. Fritz, qui était le plus résolu et cependant avait eu d'abord grand'peur, se leva, prit d'une main une épée allemande suspendue à la muraille et de l'autre la lampe qui brûlait toujours, puis s'approcha de la fenêtre. Les évolutions du rideau cessèrent, et Fritz ne put découvrir ce qui les avait causées. A peine eut-il regagné le lit qu'elles recommencèrent de plus belle.

    — Sauvons-nous, mon cousin ! s'écria cette fois Stephen.

    Et il courut vers la porte d'entrée, dont Lippobeck franchissait déjà le seuil. Les deux poltrons gagnèrent la campagne.Fritz fit appel à tout son courage et arracha le rideau ensorcelé. Quelle ne fut pas la surprise du jeune allemand en voyant alors qu'un gros rat, qui s'était pris le cou dans un des anneaux sur lesquels jouait ce rideau, était le peu redoutable auteur de toute cette diablerie. Fritz transperça de son épée l'abject sorcier.

    Enhardi par une si belle victoire, notre héros visita les pièces où le bruit mystérieux continuait à se faire entendre. Comme il s'en doutait maintenant, des bandes de rats y jouaient le rôle de sorciers. Il n'eut pas de peine à en avoir glorieusement raison.Le neveu de M. Bergenbach revint ensuite dormir sur ses lauriers.

    Ce fut ainsi que Stephen perdit le château de Risberg, mais il y gagna la sagesse de ne plus ajouter foi à de ridicules superstitions qui l'eussent fait ressembler, pour le courage, à maître Lippobeck. C'était plus qu'il n'en fallait pour le consoler.

    "Petites histoires, par Mme J.-J. Lambert."Jules Rostaing. Paris, 1859.

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